mardi 27 novembre 2012

Jacques Fame Ndongo ou la nouvelle rouerie d'un esclave lettré

Il a beau être Professeur agrégé. Il a beau manier la langue française avec une élégance achevée. Il n'est pas pauvre. Il occupe des hautes fonctions dans le dispositif du pouvoir. Pourtant, l'actuel ministre de l'Enseignement supérieur n'en est pas moins resté un bouffon. Un bouffon de luxe assurément. Celui-là même qui se définissait - en y mêlant crânement l'ensemble de ses collègues du gouvernement - comme une "créature" voire "un esclave" de Paul Biya vient encore de se fendre d'une sortie médiatique. Jamais à court d'inspiration chaque fois que son roi est écorché par des critiques, le Professeur le plus docte de la scène publique camerounaise (loin devant Mathias Eric Owona Nguini) a pris sa plume pour défendre... Franck Biya ! Dans cette Républiquette de rentiers où les sangsues et politicards papillonnent autour d'un président généreusement dépensier, d'un président qui donne le titre de ministres aux fonctionnaires pour leur faire plaisir, seuls les naïfs commettent encore la "bêtise" d'avoir honte et de défendre un honneur. C'est sans doute pourquoi l'universitaire illuminé qui déclare en privé que le RDPC gardera encore le pouvoir pendant au moins 50 ans, a cru bon, une fois de plus, de pondre une tribune dans la pravda nationale. Pour expliquer que "Mr Franck Biya a choisi un itinéraire admirable". S'agit-il d'un coup de sang, d'un accès de folie et d'une pathologie rare non encore découverte par les psychiatres ? On s'interroge. En quoi un ministre de l'Enseignement supérieur ou même un Secrétaire national à la Communication du parti au pouvoir serait concerné par des dénonciations de népotisme et de détournements de fonds publics portées contre le fils d'un chef de l’État. Surtout que ce dernier n'est ni membre du gouvernement et n'a jamais affiché un certain militantisme dans le parti au pouvoir. On a beau savoir que les ministres du Renouveau sont prêts à tout pour conserver leurs postes. On n'en reste pas moins surpris de savoir qu'ils sont capables de servir jusque dans la lingerie de la famille présidentielle. Oui ! Le Professeur veut laver le fils du chef de l'Etat de tous les soupçons. Quitte à présenter descendre dans les égouts de l'usurpation intellectuelle pour citer un journaliste "socio-politiste" qui s'est récemment érigé en expert financier. Au secours ! On se serait bien amusé du spectacle que nous offre gratuitement et régulièrement cette coterie de ministrons qui savent plus chanter les louanges du roi que s'occuper des problèmes pour lesquels ils sont nommés Eh oui ! Au lieu d'équiper des laboratoires, de construire des cités universitaires, de faire le suivi d'un système LMD moribond, de faire le suivi des étudiants étrangers parfois chassés parce que le gouvernement camerounais n'a pas payer les bourses; bref, au lieu de remplir la mission d'un ministre de l'Enseignement supérieur, le Professeur préfère cavaler entre la poésie et l'adoration. On peut le comprendre. Quand on ne sait rien faire d'autre que disserter, la démangeaison intellectuelle pousse parfois au délire philosophal. Normal donc que, en ce 21ème siècle où le Camerounais de Yaoundé demande surtout que l'eau de son robinet soit potable, le Professeur fouine dans la mythologie et/ou la préhistoire. Entre ciel et terre, fantasmes et sorcellerie, le Professeur nous balade ennuyeusement dans le "tonneau des Danaïdes", le "pandémonium", les " «Saints» descendus tout droit du cie" "l'Olympe" , "la pierre philosophale, "le Saint Graal", "la caverne ténébreuse dont Platon nous apprend qu'elle est peuplée d'ombres, d'illusions et de ténèbres, la lumière et la vérité brillant plutôt au-dessus de la caverne." Chacun se fera sa propre appréciation. Mais, repu de l'impôt des Camerounais et déconnecté de cette société qui étouffe sous le poids d'un régime incompétent et répressif, Jacques Fame Ndongo a choisi de déféquer son trop plein dans l'espace public. Oui, il avoue que travailler dans la fonction publique est un "nid douillet". Voici ce qu'il écrit : "M. Franck Biya, un jeune homme paisible qui, après une solide formation professionnelle et universitaire, s'est lancé avec pugnacité et perspicacité dans le secteur privé où compétitivité rime avec inventivité, ténacité et, parfois férocité. Et ce ne sont pas les nids douillets qui lui auraient fait défaut dans l'administration publique ou parapublique" . Voilà un aveu ! Comparer l'administration publique camerounaise à un "nid douillet" ou de "niche à sous", voilà qui est bien osé et qui condamne par avance le ministre à la sévérité du jugement populaire ! Heureusement, notre ministre a un gendarme et une ceinture sécuritaire qui le protègent du peuple camerounais. Le comble, c'est quand M. Fame Ndongo s'érige en magistrat alors même qu'une bonne partie de l'opinion ne demande qu'à faire la lumière sur cette fumeuse transaction impliquant Franck Biya. "Il n'est point jusqu'à quelques adversaires du Renouveau National qui n'aient tendance à pousser l'incongruité jusqu'à diaboliser outrancièrement ceux qui, loin des affres de la politique politicienne, et riches de leurs seuls talents et de leur probité congénitale, mènent une existence paisible et honnête. M. Franck Biya est de ces Camerounais-là qui sont plus nombreux qu'il n'y parait". Pour Fame Ndongo, le fils du chef de l’État est donc innocent. Point barre. Plus grave, il demande sournoisement à la Justice de ne point s'intéresser à l'affaire. "Laissons donc M. Franck Biya tranquille. Il ne demande qu'à travailler, dans la paix et l'amour de la Patrie, comme tout citoyen camerounais". Ainsi donc, il y a des citoyens qu'on doit "laisser tranquille" et d'autres qu'on doit juger. Il n'est interdit à personne à faire du lèche-cul. C'est aussi le droit de chaque esclave de glorifier son roi et le fils de son roi. C'est donc le droit de Fame Ndongo de nous servir une hagiographie sur le fils de son roi. Mais, que de temps et d'énergie à raboter l'image de quelqu'un qui ne s'est même pas (en tout cas, pour le moment), gêner de donner sa version des faits. Il y a encore de la place dans les amphithéâtres. A défaut de faire son travail de ministre de l'Enseignement supérieur, Fame Ndongo a le loisir de reprendre la craie. Il y a beaucoup de Camerounais qui seraient plus utiles au poste de Minesup. Ses monologues lassants - qu'il est très souvent le seul à comprendre - n'auront aucune emprise sur l'histoire. Quand viendra le temps, il faut même craindre que le jugement de l'histoire s'en serve comme preuves. En attendant, des lourds soupçons pèsent toujours sur Franck Biya qui ne pourra éternellement bénéficier de la protection de son président de père.