vendredi 23 octobre 2009

Ouvrage: Cameroun, mon pays

Sous la coordination de Joseph Fumtim, des auteurs camerounais passent leur pays au scanner

Vous êtes-vous jamais posé la question de savoir ce qu’est vraiment le Cameroun. En Egypte, en Septembre 2005, l’intellectuel camerounais Joseph Fumtim s’est vu poser la question « pour toi, l’Egypte c’est quoi ? » Dans son esprit, la question s’est muée en : « pour toi, le Cameroun c’est quoi ? » Il a donc décidé de rassembler plusieurs auteurs et intellectuels camerounais pour réaliser la photographie la plus précise que possible sur le pays des Lions Indomptables. Le Cameroun ? Un pays qui, selon la rumeur « n’a de validité que lorsque l’équipe nationale, les fameux lions indomptables, déboule sur un stade, fait frissonner le gazon et provoque des crises d’apoplexie » écrit Célestin Monga.


Un pays où le malaise de la cohabitation entre les anglophones et les francophones est plus profond qu’on ne le pense. Et, l’avocat Me Akere Muna d’écrire une « Lettre à mon frère francophone » pour lui dire d’imaginer « que le Cameroun soit un Etat dont le quart est francophone et les trois-quarts anglophones…que pendant ces 30 années, le système administratif ait complètement changé, les signalisations routières soient en anglais, tout comme le langage financier, administratif, militaire…qu’il faille harmoniser le système judiciaire ce ne soit que les notions de Common Law qu’on vous impose dans un système basé sur le code Napoléon causant des incompréhensions…Que la plupart du temps il faille traduire tous vos documents en anglais avant que la cour suprême ne siège ».

© Journalducameroun.com
Cameroun mon pays est une évocation historique, un décryptage sans concession des réalités du Cameroun. D’ailleurs, pourquoi ce pays s’appelle t-il « Cameroun », un terme qui selon l’écrivain Jean Claude Awono reflète les « déterminations coloniales et alimentaires du mot portugais Camaroes (crevettes, ce mot ne s’attache à aucun symbole chez nous) ». Selon lui, notre pays devrait s’appeler autrement. Ce pays « des révolutions avortées et des leaders charismatiques assassinés » selon l’universitaire Nathalie Etokè et qui souffre des difficultés de transport dus à la vétusté de la voie ferrée, à l’arnaque des transporteurs par les policiers sans scrupules. Un pays où le mot « partir…fait le code actuel dans les milieux jeunes au Cameroun, avec quelques applaudissements d’adultes et de parents. Partir pour devenir quelqu’un, pour devenir un homme » écrit Joseph Fumtim. Un pays où « règne un lion qui rugit un peu trop fort sans se rendre compte que ses rugissements sont sans objet pour le Cameroun » selon Marcel Kemajou Njanké. Un pays où « un vase communicant relie le palais de l’Unité (palais présidentiel, Ndlr) directement à une suite VIP de la prison de Kondengui, sinon à l’exil » affirme Patrice Nganang. Un pays qui mérite de l’espoir malgré tout selon l’universitaire et historien Achille Mbembe qui a « la certitude que ce temps viendra. Un jour prochain, le Cameroun reconnaîtra sa mort aussi bien que la dette quant à son nom. Ainsi, les générations futures ne pourront plus vivre dans l’illusion qu’il ‘n’était rien’ ».

Ouvrage collectif de 192 pages, c’est une véritable palabre autour du Cameroun, sa signification, ses réalités, ses forces et ses faiblesses. Un livre que se construit autour de récits évocateurs et d’analyses argumentées. C’est un excellent guide « pratique » sur le Cameroun qui permettra aux étrangers de mieux s’imprégner de la psychologie de ce pays dont l’histoire divise les historiens. Il s’agit d’un regard croisé totalement camerounais sur le Cameroun. Sans langue de bois ni complaisance intellectuelle. Une inquisition de conscience sur l’histoire et l’avenir de ce pays.