lundi 16 août 2010

Alain Blaise Batongué: Du rêve de diplomate à l’exercice du journalisme

Directeur de publication du quotidien Mutations et vice-président de l’Union de la Presse Francophone, il est un journaliste émérite






C’est un dimanche. 2 Mai 2010. C’est ordinairement un jour de repos. Au siège de la South Media Corporation, Alain Blaise Batongué, directeur de publication du quotidien Mutations est pressé par des multiples sollicitations. Entre son téléphone qui sonne au moins une fois toutes les 5 minutes et les reporters d’une chaîne de télévision internationale venus recueillir son avis sur la liberté de la presse au Cameroun, il trouve quelques minutes à consacrer au reporter de JDC. Dans son style, calme et courtois, il déroule plus de vingt années d’une vie de journaliste. Une vie qui l’a choisie. Car en réalité, ABB (comme l’appellent les intimes) rêvait de devenir «ambassadeur».

Quand j’étais gosse, lorsqu’on me demandait ce que je voulais faire dans ma vie, je répondais que je voulais devenir ambassadeur. Au fur et à mesure que je grandissais, j’ai compris que pour cela, il fallait être diplomate.
Alain Blaise Batongue



Courant après un destin qui n’est pas le sien, il s’inscrit après son Baccalauréat, en faculté de Droit à l’Université de Yaoundé. Sa licence obtenue, il passe une fois le concours d’entrée à l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC). Il est recalé pendant les épreuves orales. Un coup de tête du destin. Et pourtant, le journalisme l’appelle. Au lycée bilingue de Yaoundé, peut-être du fait de la qualité de mes rédactions et de mes dissertations, on m’a encouragé à intégrer le club journal se rappelle t-il. Pour lui cependant, ce n’est qu’un « hobby ». Il ne sait alors pas qu’il effectue là, les premiers pas d’un métier qui le suivra pendant de très longues années.

Les portes de la diplomatie lui ayant été fermées, il va revenir au journalisme. Il effectue le concours d’entrée à l’Ecole Supérieure des Sciences et Techniques de l’Information et de la Communication (ESSTIC) de Yaoundé en 1990. Il est reçu. Même si ce n’est pas le métier que je voulais exercer, je vais tout faire pour être le meilleur se jure t-il. Etudiant en journalisme, il officie comme correspondant du journal « Dikalo » à Yaoundé. A sa sortie de l’école, il est recruté par le ministère de la fonction publique. Il travaille à la Cameroon Radio and Television (CRTV) comme « collaborateur extérieur » et anime quelques émissions à la FM 94, une chaîne urbaine de la CRTV. Il sera consulté pour la mise en place d’un nouveau journal : « Générations » qui selon lui et l’avis de certains observateurs de la presse « reste l’un des meilleurs journaux que le Cameroun ait jamais eu ». En Juillet 1996, en compagnie de « deux amis », Haman Mana et Alphonse Soh, il participe à la création du quotidien « Mutations ». 14 ans après, il n’a pas quitté le navire. Il en est même devenu le capitaine. Directeur de Publication. Une progression verticale qui repose sur un triptyque sur lequel, il adosse toute sa carrière : le talent, le travail et la patience. « Aujourd’hui, on peut me voir rouler dans une grosse voiture et penser que c’est facile. C’est 17 ans, en fait 20 ans de travail » commente t-il. Alain Blaise Batongué n’est finalement pas devenu diplomate mais, c’est presque pareil.

Grâce au journalisme, je me suis enrichi de beaucoup de contacts et j’ai effectué beaucoup de voyages. Je ne suis pas ambassadeur au sens où je l’entendais mais je peux dire que je suis ambassadeur du journalisme.
Alain Blaise Batongue


En fait, Alain Blaise Batonguè peut se féliciter d’avoir réalisé le rêve d’un destin international. Il est à ce jour président de la section camerounaise de l’Union de la Presse Francophone (UPF) et, vice-président international de cette organisation. C’est en France en 1998 pendant la coupe du monde qu’il décide d’adhérer à l’UPF. En 2003, le président de la section camerounaise est pointé dans une affaire de trafics illicites et de visas. Tombé en « déshérence », il est sanctionné par l’organisation. En Août de la même année, le secrétaire général de l’organisation décide de procéder à la nomination d’un président de la section camerounaise de l’organisation pour « redonner de la crédibilité et de la visibilité à l’Union ». ABB est nommé. Il décide de faire profiter le Cameroun de cette position. Il organise des séminaires de formation à l’intention des journalistes au Cameroun. En outre, fait notable, grâce à l’entregent du «diplomate», le Cameroun a eu l’insigne honneur d’accueillir les 41èmes assises de l’UPF.

En fait d’ambition internationale, Alain Blaise Batonguè espère poursuivre sa carrière dans le secteur de la communication institutionnelle. Dans une organisation internationale. Après plus de 20 ans, je peux revendiquer une expérience qui me permette de faire des consultations auprès des organisations internationales pense t-il. Mais en attendant, il reste très proche des milieux de la presse.
Il y a du bon et du mauvais dans la presse camerounaise. Je suis heureux de constater que parfois la presse réussit à faire bouger les lignes. Peut-être pas encore au niveau de la Présidence de la République qui est considérée comme une imprenable citadelle mais, il y a des enquêtes au niveau de la presse qui permettent de faire bouger les choses (...) Il y a tout de même des confrères qui écrivent n’importe quoi.

Alain Blaise Batongue

Aux jeunes confrères qui le regardent en admiration, il réitère le triptyque « talent, travail et patience ». Pendant que j’étais à l’école, j’ai travaillé pour des gens qui promettaient de me payer et ne me payaient pas. J’ai supporté cela parce que je considérai ça comme un apprentissage, conseille t-il. Aujourd’hui à la tête du journal qu’il a contribué à créer il y a 16 ans, ABB, est un travailleur acharné qui veut tout savoir sur ce qu’il y a dans chaque parution. Au point de provoquer les critiques de certains de ses collaborateurs. Il s’implique dans tout. Il vérifie les articles, surveille les rubriques bref, il se comporte comme un super rédacteur en chef. Ce n’est pas ce qu’on attend d’un directeur de publication, grince l’un de ses collaborateurs qui lui reconnaît toutefois, des qualité de manager dans un contexte où il y a beaucoup de pression à gérer. Pour une carrière réussie, celle d’ABB en est une. Il a déjà eu presque tout ce dont un journaliste peut rêver. Des moyens financiers, beaucoup de voyages à l’étranger, une réputation établie, un solide carnet d’adresses. Peut-être lui manque t-il juste de créer son propre journal admire un jeune confrère. Aurait-il été tant comblé s’il était devenu diplomate? Mystère du destin.