vendredi 12 décembre 2008

Cameroun : René Emmanuel Sadi, futur Président de la République ?

Dans l’opinion, beaucoup se font déjà à l’idée que René Emmanuel Sadi succèdera à Paul Biya, en 2011 ou en 2018. Dans les allées du pouvoir, certains lui font même déjà la révérence. Deux journaux proches des milieux du pouvoir de Yaoundé l’ont présenté comme « le dauphin » de l’actuel chef de l’État. Pourtant, il reste un personnage très peu connu du public camerounais. Il n’a été projeté au devant de la scène médiatique et politique que suite à sa nomination au poste de secrétaire général du comité central du parti au pouvoir en avril 2007. Lumières sur cet homme qui pourrait devenir le 3ème président de la République du Cameroun.


Né en 1948 à Maroua dans l’extrême-Nord du Cameroun, René Emmanuel Sadi a fait ses études à Yoko, Bafia et Ngaoundéré au Cameroun jusqu’à la licence de droit à l’ex-Université de Yaoundé. Le fils de François Sadi, infirmier, intègra par la suite l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (Iric). Une formation qui lui ouvre les portes de la diplomatie et le mène en Egypte où il sera respectivement chef de service, deuxième secrétaire et premier secrétaire de l’ambassade du Cameroun au Caire. Il est, par la suite, rappelé au Cameroun à la présidence de la République où il est nommé conseiller technique puis conseiller diplomatique avant de débarquer au ministère des affaires étrangères lorsque survient le putsch manqué du 6 Avril 1984 contre Paul Biya.

Suivra un court moment de disgrâce à laquelle n’échappe pratiquement aucun des fidèles de l’ancien régime d’Ahmadou Ahidjo. Sans doute lavé de tout soupçon concernant le putsch manqué, il est rappelé à la présidence de la République comme conseiller avant d’être promu directeur adjoint du cabinet civil en 1985. En Décembre 2004, il gravit une nouvelle marche à la présidence de la République : René Emmanuel Sadi est nommé secrétaire général adjoint à la présidence. Une position qui lui permet alors de faire partie des voyages officiels et officieux du chef de l’État. Le 4 Avril 2007, Paul Biya décide de lui confier le secrétariat général du comité central du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (Rdpc). Ce qui fait de lui, le principal animateur du parti au pouvoir. Un excellent tremplin aux yeux de beaucoup pour ne pas dire la voie royale vers la charge suprême.

Les atouts d’un dauphin

Même si, au Cameroun, décrypter les intentions du chef de l’État relève d’un exercice presque mystique, il existe un certain nombre d’indices qui voient dans cette ascension une succession programmée. Parmi ces indices, René Emmanuel Sadi est issu d’un groupe ethnique minoritaire (ressortissant du Mbam et Kim de la province du Centre). Paul Biya évite, du coup, une rivalité ethnique tacite entre les ressortissants du Nord qui revendiquent l’héritage politique du premier président camerounais, Ahmadou Ahidjo et les Beti qui espéreraient continuer à gouverner après Paul Biya qui est un des leurs. Le président camerounais a néanmoins nommé deux secrétaires généraux adjoints issus de ces groupes ethniques : Grégoire Owona qui est Beti et Hamadjoda Adjoudji qui est du Nord.

Cette nomination de Sadi aurait également été motivée par le fait que le concerné n’aurait jamais ouvertement nourri des ambitions présidentielles. En outre, contrairement à la majorité des barons du régime, il n’a presque jamais été épinglé par la presse camerounaise qu’on sait généreuse en scandales, pour une quelconque implication dans la corruption et autres actes mafieux. Aussi, à 60 ans, René Sadi est-il certainement à l’intersection entre l’âge de l’apprentissage des rouages de la politique et l’âge où l’on est forcément grisé par le pouvoir ou sa conquête. À défaut d’être jeune, René Sadi a un âge où il peut encore espérer faire longue route. L’un de ses atouts est aussi son tempérament. Autant discret, effacé et subtil que Paul Biya lui-même, René Sadi est sans aucun doute le contraire des autres « dauphins » de Paul Biya qui se sont souvent illustrés par des comportements tapageurs et leur impatience boulimique d’accéder au pouvoir. Il est, à ce propos, identique à celui que fut Paul Biya en 1982, lorsqu’il fut désigné pour succéder à Ahmadou Ahidjo. Enfin, les 30 ans qu’il a passés dans les arcanes de la présidence de la République pourraient s’avérer déterminantes pour la gestion du pays. Par ailleurs, en le hissant au secrétariat général du comité central du Rdpc, Paul Biya veut, sans doute, lui insuffler des aptitudes politiques qui seront nécessaires à l’homme d’État qu’il pourrait devenir.

Un dauphin de plus ? Beaucoup d’observateurs se posent la question, tant il est vrai que le Cameroun en a connu une bonne dizaine. Pratiquement tous les anciens secrétaires généraux de la présidence de la République en ont porté le soupçon. Toujours est-il que René Sadi a deux paires de manche : il est à la fois secrétaire général adjoint de la présidence de la République et secrétaire général du parti au pouvoir. De plus, il n’est pas exclu que Paul Biya décide de se retirer bientôt pour une retraite méritée. Rien ne l’empêcherait alors d’influer sur le cours de l’histoire pour se faire succéder par son « dauphin ».|

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